Bosnie Herzégovine

20 Mai 2017

L’arrivée en Bosnie, un dépaysement complet !!

Arrivant des montagnes croates, nous avons passé la frontière bosniaque au Nord-est du pays par une toute petite route.

Notre dépaysement est complet dès le passage de la frontière, côté croate, c’est une route goudronnée, un poste frontière abrité avec une barrière automatique comme celles que nous avons croisé jusqu’à maintenant. Côté Bosniaque, c’est une petite cabane, une barrière manuelle, un douanier interloqué, méfiant puis accueillant (Il en oublie de tamponner nos passeports). Juste après la frontière, la route n’est plus goudronnée. Nous croisons de nombreuses femmes, cuisinant dans de grandes marmites au feu de bois à l’extérieur, devant leurs maisons.

Après quelques kilomètres, nous découvrons les premières mosquées et les appels à la prière. C’est impressionnant comme une frontière peut séparer deux mondes complètement différents, qui faisait pourtant partie du même pays 25 ans auparavant.

Beaucoup de questions des filles sur ce que nous découvrons, notamment sur les appels à la prière qui effraient énormément Myrtille au début.

(Alors qu’elle venait de crier et faire n’importe quoi, l’appel à la prière retenti très fort et Pierre-Yves lui dit que le Monsieur l’avait vu et était en train de la gronder… Je vous laisse imaginer sa tête, et ce n’était pas évident de lui faire comprendre la blague de son papa !!!)

Nous retrouvons une route goudronnée quelques kilomètres plus tard, les moutons rôtis à la broche devant les restaurants nous attirent, mais nous devons résoudre un premier problème, trouver des Marks Covertibles (monnaie locale de la valeur de l’ancien Marks allemands, c’est à dire quasiment 0,50 €).

Nous gardons notre habitude de chercher des petites routes, pour éviter d’avoir trop de circulation, mais nos observations seront régulièrement les mêmes sur toute la Bosnie. A part les grands axes, rares sont les routes goudronnées, et on peut très vite se retrouver dans un chemin de boue avec une pente à plus de 15 % !!!

Mais, de ces petits chemins, nous en gardons de grandes rencontres, significatives d’une hospitalité remarquable.

Rien que pour notre premier jour en Bosnie, on nous a offert des pâtisseries à la boulangerie où nous avons manger le midi. Quelques kilomètres plus loin en empruntant un petit chemin juste avant de faire demi-tour face à une grande pente infranchissable, un couple nous convie à venir boire un verre. Nous acceptons, et le temps d’un grosse averse de pluie, en communiquant qu’avec les gestes, ils nous offrent des cerises, du melon, une pâtisserie, et nous donnent plein de choses pour repartir (tablettes de chocolat, une bouteille de Coca, …). Et pendant tout ce temps, nos hôtes avaient soigneusement dépliés des bâches pour abriter nos vélos.

Nous sommes repartis très touchés par cette bienveillance, totalement anonyme, mais avec des regards et des sourires, qui montraient à quel point ces échanges étaient agréable pour tous.

P1010907

Le soir même, alors que nous cherchions à nous abriter et à monter la tente au plus vite suite aux averses de plus en plus nombreuses, nous nous ferons conviés à venir nous installer dans 2 maisons en même temps. Et nous voilà dans la délicate situation de devoir refuser une des deux invitations, après avoir partagé un peu de poulets rôtis avec une sorte de grosse galette épaisses, un vrai délice !!

Une fois abrité, dans une sorte de garage aménagé en petit appartement, nous avons du mal à redescendre de toutes nos émotions et sollicitations de la journée.

 

Le lendemain, toujours sur un petit chemin, au milieu de nul part, entre des maisons en ruine détruites par la guerre et un panneau prévenant de la probable présence de mines antipersonnel, une personne nous interpelle en français. Il s’agit de Culibrk, un Serbe qui a travaillé 20 ans en France dans les années 70, 80, avant de rentrer en Yougoslavie avec ses 4 enfants nés en France, juste avant cette effroyable guerre de Bosnie. Il parle parfaitement français et est très émus de voir des Français venir chez lui. Nous sommes conviés à manger, boire un verre de jus de sureau maison ou de Rakija et nous nous régalons de spécialité Bosniaque. Avec sa femme Pava, et son fils aîné, ils nous racontent leur vie, leur grande reconnaissance pour ce que la France leur a apporté, leur retour en Yougoslavie et la terreur de la guerre, qui a détruit leur maison, tuée leurs voisins, brûlée toutes leurs photos de France qu’ils auraient souhaités nous montrer. Après cette guerre, où femmes et enfants étaient réfugiés pendant que le père et le fils étaient sur le front, ils sont revenus reconstruire leur maison au même endroit. Ils vivent aujourd’hui, presque en autarcie entourés des maisons détruites des anciens voisins morts pendant la guerre.

Suite à ces témoignages transmis les larmes aux yeux, nous repartons un peu bouleversé par tout ce que nous venons d’entendre. Je retiendrais cette phrase que Culibrk n’a cessé de répéter : « la guerre c’est les grands qui la décident, pour leurs intérêts, mais c’est nous les petits, on se tuent et on perd tout avec la guerre »… « Tout est beau dans la vie, sauf la guerre, et le divorce »

Pendant toutes ces discussions, les enfants auront eu le plaisir d’avoir une grand-mère de remplacement et la possibilité de jouer avec tous les jeux de leurs petits-enfants… et même de regarder un épisode de Mouk en Bosniaque (ou Croate ou Serbe, parce que ce que nous venons de comprendre c’est que ces 3 langues sont en réalité la même!!)

Juste après cette rencontre nous passons de la Fédération de Bosnie Herzégovine à la République Serbe de Bosnie. Ces deux entités correspondent à un partage des territoires au sein d’un même pays, la Bosnie-Herzégovine. S’ajoute à cela le district de Brcko, revendiqué par ces entités, finalement sur un statut indépendant et mixte. C’est une organisation très complexe et on repère très rapidement que l’on est loin d’une unité nationale !

En effet, la guerre est bel et bien finie, mais les blessures sont encore très vives. C’est une guerre qui aura fait 100 000 morts et presque 2 millions de réfugiés, ce qui est énorme dans un pays de 3,5 millions d’habitants. Beaucoup de civils ont été tués volontairement, avec des massacres collectifs dont le plus important est celui de Sebrenica, de plus de 8 000 morts entassés dans des fosses communes.

Aujourd’hui, on pleure ses morts, on reproche la cruauté de l’autre, où le manque d’objectivité sur l’ensemble des massacres commis, on est nostalgique d’une Yougoslavie où on vivait bien ensemble, … On est bien loin d’une reconstruction collective !!!

Pour nous c’est très déstabilisant, tout le monde est très accueillant avec nous et nous avons du mal à comprendre comment ces peuples aussi bienveillant envers nous ont pu se transmettre autant de haine respective.

Il est d’ailleurs fréquents que l’on ne sache pas vraiment de quels « ethnies »  sont nos interlocuteurs. Nos seuls repères fiables sont les différentes églises et la présence de porcs. Oui, parce qu’un des éléments très important ici, tout le monde à un potager et des animaux chez lui. C’est une nécessité pour pouvoir se nourrir !

 

De toutes ces horribles histoires, nous en tirons une nouvelle leçon des conséquences inéluctable des nationalismes de tous bords qui divisent et hâtisent la haine entre les peuples. Nous qui aimons l’idée que nous pouvons tous vivre ensemble quelques soit nos ancêtres, nos croyances et nos histoires, nous sommes bien déçus de ce découpage « ethnique » d’un même pays. Tout cela nous montre aussi un échec d’un système démocratique qui ne s’appuie que sur la majorité.

Sommes nous si utopiques ?

 

Pour en revenir à nos itinéraires, nous restons donc la plupart du temps sur les grands axes, et nous nous régalons de plats locaux pour peu d’argent. Alors que nous roulons à vive allure, Nino n’est pas tout à fait d’accord pour s’endormir, après 10 longues minutes de pleurs, nous avons eu la plus grosse frayeur de l’année (espérons). A force de bouger dans son hamac, il a desserré les sangles de la ceinture et a plongé en avant sur la route. Pierre Yves à immédiatement entendu les pleurs s’éloigner.Le temps qu’il fasse demi tour et que je m’approche, nous étions tous les cinq, se cajolant les uns les autres, sur le bas côté de la route.

Nino n’a rien, juste quelques égratignures sur le visage, mais nous avons eu du mal à nous en remettre. Après quelques explications sur le parking d’un petit magasin, où tout le monde venait faire sa pause déjeuner, nous voilà embarqué direction l’hôpital le plus proche. Les enfants, Marine et le vélo de Piv sont entassé dans la voiture de notre sauveur, Piv, le tandem et la chariotte nous rejoigne 20km plus loin, à l’hôpital.

Le docteur me regarde, regarde l’égratignure de Nino, me rigole au nez, me donne un papier, me fait payer, ciao bye bye, il n’a rien ce bébé ! Noté que la plaie ne fut pas désinfectée… nous découvrons donc un système de santé qui doit faire au mieux avec peu de moyens. Nous le comprenons très rapidement en croisant les autres patients durant les longues minutes pour attendre Piv avec mes trois loulous devant l’hôpital.

L’homme qui nous a amené à l’hôpital nous invite à dormir chez lui le soir, il nous reste 20 km pour rejoindre notre hôte. Là-bas, tout le voisinage se rassemble autour de notre maison d’un soir, des curieux adorables qui nous font penser à autre chose. Nous apprenons, alors que nos enfants sont tous les trois endormi dans « leur » chambre, que le lendemain matin, tout le monde décolle à 6H pour l’école ou pour travailler … Nous apprenons ça alors qu’il est… 00h30, et que les affaires ne sont pas du tout prêtes…

Après une très courte nuit, nous voilà prêt à pédaler à …. 6H…. Avec encore une fois de nombreux cadeaux, chocolats pour les enfants et une grande bouteille de Rakija !!!

Nous devons donc comprendre les rythmes de ce nouveau pays, quand mangent-ils, quand dorment-ils ?… Et nous nous posons les mêmes questions concernant leurs enfants… ?

 

Ce jour là, le 23 mai, nous avions fait 35km à 10h, de quoi battre notre record ! La chaleur commence à bien se faire sentir et nous profitons d’un marché extérieur pour faire quelques emplettes. Alors que nous avons déjà eu quelques mauvaises surprises concernant les indications de campings sur notre GPS, nous tentons notre chance direction Mlinska Rijeka, et par chance, cet énorme terrain de loisirs est ouvert et nous pouvons poser la tente. Nous sommes certainement les premiers à poser une tente ici, étonnant pour un camping, mais nous sommes très bien accueillis, sous une pluie battante, par du jus de pomme et toujours de la Rakija. Nous décidons de profiter de cet superbe endroit pour s’arrêter une journée supplémentaire. Nous avions tout à disposition, sanitaire, piscine, restaurant, bac à sable, jeux pour les enfants, abri avec table et chaise, WIFI.. C’était parfait !

Puis, les gérants ont inventé une taxe de séjour et ont réussi à nous faire payer plus du double du tarif qu’ils nous avaient annoncé ! Au final, on en a eu pour plus cher que notre précédente nuit  à l’hôtel, …. Étonnant et décevant, cela fait parti du contraste que nous avons pu repérer en Bosnie, si en règle général l’hospitalité est démesuré, et nous sommes impressionnés par ce peuple (ces peuples) qui a si peu et qui donne tout, on aussi  pu repérer quelques fois, que les tarifs augmentaient rien que pour nous.

Mais le principal est que nous repartons reposé, prêt à réinstaller Nino dans sa chariotte. (Nous faisons des nœuds sur ses sangles maintenant, et avons rendu le hamac un peu plus souple, ce qui permet à Nino de s’endormir plus facilement : plus de colère!)

Nous enchainons les km toujours sur des routes assez passantes, mais on est bien visible avec nos gilets jaunes. Nous recevons un peu moins d’invitations, mais trouvons toujours un petit coin d’herbe pour passer la nuit.

Anecdote assez rigolote : un soir, nous nous installons derrière la salle des fêtes, nous nous présentons aux voisins et sommes prêts à coucher les enfants quand le lampadaire juste au dessus de la tente s’allume : on y voyait comme en plein jour ! Les enfants ont réussi à s’endormir , mais on n’était vraiment pas discret avec ce projecteur sur notre tente !

Quelques jours auparavant, alors que trois chiens nous coursaient en aboyant et en montrant les crocs (rencontres de plus en plus fréquentes avec des chiens errant depuis notre arrivée en Bosnie), une ambulance qui était sur la voie d’en face en a shooté un, ses deux compères nous ont donc lâché les roues pour secourir ce dernier, mal en poing sur le bord de la route… Je vous laisse imaginer la discussion qui s’en suit avec Lola sur le tandem …

Nous découvrons la ville de Sebrenik grâce à une pause chez Asmir et ses parents. Rencontre warmshower encore tout à fait incroyable. Un accueil si chaleureux (et pourtant très tardif suite à une mauvaise indication GPS) qu’on y reste une journée supplémentaire. Les parents d’Asmir mettent les petits plats dans les grands pour nous recevoir, Asmir, jeune homme de 24 ans nous fait visiter la vieille ville entre deux journées de boulot (il travaille 7j/7) et prépare tranquillement son mariage, bientôt, il quittera son nid !

La forteresse de la vieille ville est vraiment somptueuse, nous avons tenter de la rejoindre à vélo lors de notre journée de repos, mais après 6 km sur pente très raide, nous avons fait demi tour, et avons apprécier la proposition d’Asmir de nous y conduire. Et de nouveau, nous sommes au première loge, un chien s’est jeté sous la voiture ! Asmir nous explique alors que beaucoup de chiens sont abandonnés par faute de temps et d’argent, leur maîtres ne prennent plus soin d’eux, et la Bosnie est envahie de chiens errants… A suivre donc, nous allons être vigilants lors de nos futurs rencontres canines !

Nous reprenons la route, pour une nouvelle journée sous le signe des cadeaux !Dés notre départ, les parents d’Asmir nous préparent des cerises, sa grand-mères des biscuits, et ils nous restent encore des chocolats offerts par le tonton à notre arrivée. Lors de notre pause du midi, un homme nous donne même de l’argent pour les enfants !, un autre des boissons fraîches, puis des fraises, des biscuits… La liste se rallonge tout au long de la journée ! Nous découvrons un superbe lieu pour bivouaquer, sommes accueillis comme rarement par le voisinage. L’une nous offre des fraises et des biscuits maison, d’autres partagent leur apéro/dîner/pique nique et nous font découvrir les cevap (sorte de saucisse cuitent au barbecue accompagné d’un bon pain), Ibrahim nous offre le wifi, et du produit antimoustique… Mais pourquoi donc ? Nous sommes le long de la rivière et les moustiques nous dévorent ! Impossible pour Marine et les enfants de rester dehors. Nous finirons notre repas à l’abri dans la tente alors que les discussions, sans parler la même langue, sont riches et sincères. Un tracteur passe et vaporise un insecticide puissant sous nos yeux… Le résultat est immédiat tous les insectes se retrouvent agonisant au sol en quelques minutes. Bivouac au milieu de la nature dites vous !!! Nous ne savons pas ce que l’on respire, mais cet endroit reste cependant magnifique.

IMG_20170528_205425

Le lendemain matin, nous félicitons un pécheur qui nous montre ses poissons et remercions les voisins, nous partirons sous les yeux protecteurs de nos « hôtes » qui nous prennent en photo.

Alors que nous faisons le plein d’eau à la source du village et que nous en profitons pour laver un duvet/pipi, une femme en fauteuil roulant, son bébé sur les genoux, et sa fille ainée bouteille à la main vinrent faire le plein d’eau, elles aussi. Pas d’eau potable à la maison visiblement ! Les filles nous posent encore une fois plein de questions, et ce n’est pas toujours évident de trouver les mots juste.

Ce sera notre dernière journée en Bosnie.

Nous sommes assez mitigé. La Bosnie est belle, mais souffre encore des suites de la guerre, les cultures tellement diverses sont riches mais absolument pas exploitées ! Nous nous sommes parfois senti « touristes riches » parfois « invités privilégiés », mais nous gardons en tête de superbes rencontres, et on se demande vraiment comment peut on donner autant que ce qu’on a reçu en si peu de temps !

P1010932.jpg

Nos sauveurs…

Publicité

3 réflexions sur “Bosnie Herzégovine

  1. Hiha Un texte à lire, ça devient un rendez vous avec vous ! Rires et pleures (d’émotion et de joie, biensur 🙂 )viennent tout seul en vous lisant! Gros bisous et au prochain poste !

    J’aime

  2. Bonjour

    C’est Léo du festival Cyclo-Camping International à Paris.

    J’ai eu le plaisir de visionner ton joli film à Chambéry et je me suis demandé si tu as envie de l’offrir pour Paris.

    Je ne sais pas si tu connais déjà le festival de Vincennes mais, si non, voici une petite vidéo qui explique CCI et le festival:

    Il se tient toujours au troisème week-end de janvier.

    C’est dommage que la programmation du festival 2022 soit déjà bouclée mais je travail déjà sur celui de 2023. Si tu aimes l’idée, as-tu envie de m’envoyer ton film par WeTransfer, afin qu’il soit tout prêt ? Je l’attends avec impatience.

    Bon, mes félicitations et à bientôt, j’espère.

    happy days
    léo

    J’aime

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Image Twitter

Vous commentez à l’aide de votre compte Twitter. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s